Le service civil représente ce que les États-Unis ont de meilleur : renforcer la communauté, offrir des possibilités à ses membres et récompenser la responsabilité. Le service civil est un défi lancé aux Américains de tous les milieux. Il relativise la valeur de l'argent. C'est la façon d'agir que les Américains ont choisie pour changer leur pays.-- le président Bill Clinton, 1er mars 1993
C'est avec ces paroles que le président Clinton a lancé AmeriCorps et la Corporation for National Service (Corporation pour le service civil national), entamant ainsi un nouveau chapitre dans la longue tradition américaine de service civique. Depuis 1993, des millions d'Américains participent au service civil et, ce faisant, apportent des améliorations durables à leur communautés et prouvent que cette façon de servir son pays peut être une stratégie efficace permettant de résoudre les problèmes.
Reconnaissant que notre force, en tant que nation, dépend d'individus qui tiennent l'engagement qu'ils ont pris d'aider leur prochain, le service civil donne à tous les citoyens la possibilité d'apporter leur contribution à cette tâche. Les Américains sont de plus en plus nombreux à saisir ces possibilités en donnant des leçons particulières aux écoliers, en renforçant la sécurité de leur quartier, en aidant les communautés à se relever de catastrophes naturelles, en participant à la construction de logements en collaboration avec Habitat for Humanity, en entretenant les parcs et en accomplissant des centaines d'autres tâches pour améliorer la vie de leurs concitoyens et les unir.
Faire appel au pouvoir qu'ont les citoyens de se rendre utiles à la collectivité va devenir encore plus important alors que nous nous apprêtons à entrer dans un nouveau siècle en butte à de nombreuses difficultés. Nous ne nous tournerons plus vers le gouvernement pour résoudre la plupart de nos problèmes. La réduction des effectifs gouvernementaux ne veut pas dire que nos problèmes ont disparu. En fait, un grand nombre d'entre eux, de la criminalité à la toxicomanie, en passant par l'analphabétisme et la condition de sans-abri, ne font que croître, au contraire.
Pour résoudre ces problèmes, nous devons libérer les plus grandes forces que possède notre pays : le dynamisme et l'idéalisme de sa population. Un gouvernement tentaculaire n'est pas la solution, mais nous avons besoin de gens influents capables de s'attaquer aux problèmes qui s'accumulent dans notre société. Tel doit être notre objectif - libérer cette force que représente le civisme pour lui permettre de résoudre nos problèmes les plus pressants.
Par le truchement de ses programmes Learn & Serve America, Senior Corps et AmeriCorps, la Corporation for National Service travaille avec des milliers de partenaires bénévoles pour renforcer le secteur privé et donner libre cours au pouvoir des citoyens. Notre but est de faire du service à la collectivité un rite de passage pour chaque jeune Américain, une activité coutumière pour les Américains de tous âges.
La tradition américaine de service
Certes, le service civique n'est pas une idée nouvelle dans ce pays. Durant son séjour en Amérique, dans les années 1830, Alexis de Tocqueville avait remarqué que les Américains n'attendaient pas que leur gouvernement agisse pour s'attaquer à un problème. Si la communauté avait besoin d'une école, ses membres la construisaient et de Tocqueville s'émerveillait de voir les Américains constamment former de nouveaux groupes pour s'attaquer à des objectifs communs. à ce jour, aucun autre pays au monde n'a un tel réseau de clubs, de groupes religieux et civiques et d'associations de quartier.
Durant ce siècle, chaque nouvelle génération d'Américains s'est montrée à la hauteur de la tâche dans ce domaine. Durant la grande crise des années 30, quatre millions de jeunes se sont joints au Civilian Conservation Corps pour planter des arbres, remettre les parcs en état et construire des routes et des ponts dont nous profitons encore aujourd'hui. Dans les années 1940, le GI Bill (Loi d'aide aux anciens combattants) a, pour la première fois, lié le bénévolat aux possibilités d'éducation quand la nation reconnaissante a récompensé les combattants de la seconde guerre mondiale, à leur retour au pays, en finançant leurs études.
Pour la génération suivante, l'appel au service est venu du président John Kennedy, qui fonda le Corps de la paix en 1961: « Ne demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, déclarait le président Kennedy, mais ce que vous pouvez faire pour votre pays. » Depuis lors, plus de cent quarante mille volontaires du Corps de la paix se sont rendus dans les régions les plus pauvres du globe pour y construire des écoles, aider les agriculteurs, soigner les malades et mettre en place une communauté mondiale.
Les années 1960 ont également vu la naissance de Volunteers in Service to America (Volontaires au service de l'Amérique - VISTA). Pendant plus de trente ans, VISTA a aidé des communautés à faible revenu à s'aider elles-mêmes. Avec VISTA, toute une série de programmes de bénévolat a commencé à naître, notamment les groupes locaux de protection de la nature et les associations de jeunes citadins. Par ailleurs, les possibilités d'actions bénévoles offertes par les lycées et collèges universitaires, les milieux d'affaires, les églises et les organisations civiques se sont multipliées.
Le dernier né de ce mouvement est AmeriCorps, qui a été créé par le Congrès des États-Unis et le Président Clinton en 1993. Il découlait de la première loi sur le service civique signée par le président Bush en 1990.
Depuis 1993, près de cent mille jeunes ont servi dans AmeriCorps, aidant à résoudre des problèmes dans l'enseignement, la sécurité publique, l'environnement et à répondre aux besoins sociaux. Rien que cette année, plus de quarante mille membres d'AmeriCorps serviront dans plus de douze cents collectivités. En échange d'une année de service à plein temps, les membres d'AmeriCorps reçoivent une indemnité de subsistance et quatre mille sept cent vingt-cinq dollars pour payer leurs études ou rembourser des prêts souscrits pour leur scolarité.
L'accent sur les résultats
La devise d'AmeriCorps est la suivante : Obtenir des résultats, et l'accent mis sur l'efficacité est payant de nombreuses façons tangibles. En un an, les membres d'AmeriCorps ont donné des cours particuliers à plus de cinq cent mille écoliers, en ont conseillé quatre-vingt-dix mille autres, ont recruté trente-neuf mille nouveaux volontaires, vacciné soixante-quatre mille enfants, aidé les victimes de catastrophes naturelles dans plus de trente états, travaillé avec plus de trois mille patrouilles de sécurité, forces de police et groupes civils locaux, formé cent mille personnes à la prévention de la violence, construit ou rénové cinq mille six cents logements, aidé à placer trente-deux mille sans-abri dans des résidences permanentes, travaillé avec des personnes atteintes du sida et autres maladies graves, et mené à bien une vaste gamme de projets relatifs à l'environnement. Un élément clé de l'action d'AmeriCorps est la façon dont le service à plein temps développe le bénévolat traditionnel. Les principales organisations bénévoles américaines, Big Brothers/Big Sisters, United Way, le YMCA (Young Men Christian Association - Association chrétienne de jeunes hommes) et la Croix-Rouge américaine, engagent et utilisent des membres d'AmeriCorps. Elles ont constaté que le personnel à plein temps d'AmeriCorps les aidait à accomplir davantage, à recruter un plus grand nombre de bénévoles et à utiliser ces derniers plus efficacement. Des études ont permis d'établir que chaque membre d'AmeriCorps procure à la collectivité douze autres bénévoles. Les membres d'AmeriCorps éprouvent une grande fierté à travailler dans leurs collectivités respectives et à les aider à résoudre des problèmes pour lesquels elles n'avaient pas trouvé de solution. C'est le cas, par exemple, de Michelle Harvey, dont l'équipe d'AmeriCorps, à Kansas City, a aidé à fermer quarante-quatre locaux fréquentés par les drogués et à mettre un quartier à l'abri des trafiquants de drogue, ou de Sean Whitten, qui a mis à profit la formation qu'il avait reçue à l'AmeriCorps pour sauver une jeune femme égarée pendant deux jours, par un temps glacial, dans les montagnes du Tennessee.
AmeriCorps n'est que l'un des nombreux programmes dirigés par la Corporation for National Service et auxquels participent bénévolement plus de quatre cent cinquante mille personnes âgées dans le cadre de trois programme du Corps national des personnes âgées : Foster Grandparents (grands-parents d'accueil), Senior Companions (companions de personnes âgées) et RSVP Retired and Senior Volunteer Program, programme de retraités et personnes âgées bénévoles). À l'heure actuelle, les États-Unis ont le groupe le plus nombreux, le plus instruit de personnes âgées de leur histoire, et leur nombre s'accroît rapidement. Nous devons faire davantage pour utiliser pleinement la somme de compétences et d'expérience acquise, en tant que travailleurs, parents et citoyens, par plus de cinquante millions de personnes âgées.
L'autre vaste réservoir de talent qui ne demande qu'a être utilisé est constitué par les cinquante millions de jeunes de nos écoles, collèges universitaires et universités. Par le truchement de Learn & Serve America (Apprendre et servir l'Amérique), nous fournissons à près d'un million d'écoliers et d'étudiants, de la maternelle à l'université, la possibilité de satisfaire les besoins de la communauté tout en améliorant leur éducation et en acquérant l'habitude du civisme. Ce programme aide les enseignants à intégrer le bénévolat dans les programmes d'études, une méthode d'enseignement appelée instruction liée au bénévolat. En fournissant des services bénévoles, les écoliers et étudiants apprennent à travailler en équipe, et acquièrent autodiscipline et initiative, des qualités qui les aideront à devenir des travailleurs plus productifs et des citoyens plus conscients de leurs responsabilités.
Le service civil national sous toutes ses formes aide à atteindre l'un des principaux objectifs nationaux de l'enseignement. Dans le cadre de l'America Reads Initiative, le président Clinton demande aux écoles et aux communautés de faire en sorte que tout enfant américain sache lire à la fin de sa troisième année d'école primaire. Il recommande que l'on recrute une armée de volontaires pour travailler bénévolement dans les écoles locales pendant ou après les heures de classe, afin d'apporter une aide supplémentaire aux millions d'enfants qui ne possèdent pas de compétences suffisantes en lecture. Il demande qu'on augmente le nombre de volontaires de l'AmeriCorps et de personnes âgées et étudiants bénévoles pour organiser ou mettre sur pied les programmes de soutien et apporter aux écoliers une aide directe. Le Congrès a voté des sommes importantes pour cette expansion du programme
L'aide aux enfants
Nulle part l'aide des bénévoles américains n'est plus nécessaire que pour s'occuper, guider et éduquer les enfants. Les jeunes d'aujourd'hui sont exposés à des risques inconnus de leurs parents et grands-parents, qui vont du sida à la facilité d'accès aux armes à feu et à la drogue. Un enfant sur quatre est victime de violences ou de mauvais traitements. Un sur cinq vit au-dessous du seuil de pauvreté. Si le taux de criminalité baisse dans l'ensemble de la population, chez les adolescents, par contre, il augmente, notamment en ce qui concerne les actes de violence.
Mobiliser des bénévoles et d'autres secteurs de la société pour aider les enfants à réussir était l'objectif principal du Sommet pour l'avenir de l'Amérique qui s'est tenu en avril 1997 à Philadelphie, sous la présidence du président Clinton, de son prédécesseur immédiat M. Bush, d'autre anciens présidents des États-Unis, du général Colin Powell, de trente-sept gouverneurs et de nombreux dirigeants des milieux d'affaires, du gouvernement et d'organisations sans but lucratif. Le Sommet a préconisé une nouvelle ère d'action civique aux États-Unis pour renverser les tendances actuelles au profit des millions d'enfants qui s'acheminent vers le désastre.
La campagne lancée à Philadelphie, baptisée America's Promise, Alliance for Youth (La promesse de l'Amérique, alliance en faveur des jeunes) est maintenant en cours sous la direction du général Colin Powell, avec le soutien de tous les anciens présidents des États-Unis encore en vie. America's Promise vise à fournir à tous les jeunes des États-Unis les cinq ressources dont ils ont besoin pour réussir : un adulte qui s'intéresse à eux (conseiller, répétiteur ou entraîneur) ; un cadre de vie dans lesquels ils peuvent grandir et s'instruire en toute sécurité ; un départ sain dans la vie ; une solide éducation qui leur fera acquérir des compétences en lecture et des qualifications commercialisables ; et la possibilité pour tous de donner d'eux-mêmes pour servir leur prochain.
La Corporation for National Service a été fière de lancer et de cofinancer ce sommet en association avec la Points of Light Foundation (Fondation des points de lumière) et elle continuera à jouer un rôle de premier plan dans cette campagne nationale. Depuis le sommet, elle a ajouté à ses effectifs neuf mille nouveaux membres d'AmeriCorps soutenus par des organisations communautaires et religieuses, aidé à obtenir la participation de mille collèges universitaires et universités à un programme dans le cadre duquel des étudiants ayant un emploi rémunéré par l'université vont travailler comme répétiteurs dans des écoles primaires, et a lancé le programme Seniors in Schools auquel participent sept cents personnes âgées bénévoles réparties dans neuf villes qui aident les écoliers.
En plus de mieux servir la jeunesse, le Sommet a également lancé une initiative visant à amener davantage de jeunes à fournir des services bénévoles. Martin Luther King avait déclaré : « Tout le monde peut être grand parce que tout le monde peut servir. » Les jeunes ont besoin d'être encouragés et inspirés pour découvrir et atteindre cette grandeur. Tous les jeunes Américains devraient pouvoir se considérer, et être considérés par leur prochain, comme des chefs de file et comme une richesse, et non pas comme des problèmes ou des victimes.
L'ancien gouverneur du Michigan, M. George Romney, qui avait fait le rêve d'organiser un tel sommet et qui, jusqu'à sa mort, s'était employé à réaliser ce projet, avait dit un jour que le bénévolat n'était pas une activité de tout repos. Le bénévolat exige en effet de l'organisation, du temps et des ressources de tous les secteurs : public, privé et sans but lucratif. De même que nous investissons dans les routes et les ponts pour maintenir la force de notre économie, de même nous devons investir dans le service communautaire et le bénévolat pour maintenir la force de la démocratie. Les collectivités saines ont besoin de citoyens instruits et actifs.
Le penchant secret des Américains et le secret de leur succès ont toujours reposé sur leur conviction qu'ils pouvaient changer les choses, améliorer la situation, et qu'en travaillant de concert, ils pouvaient venir à bout de leurs problèmes les plus ardus. Au moment où nous nous apprêtons à entrer dans un nouveau siècle et dans une nouvelle ère caractérisée par une action gouvernementale limitée, cette idée et la façon dont nous la mettrons en pratique seront plus importantes que jamais.
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Morris Wofford, ancien sénateur de Pennsylvanie, est directeur administratif de la Corporation for National Service.
La Société
américaine
Revue électronique de l'USIA, volume 3, numéro
2, septembre 1998