UNE OPTIQUE CONSERVATRICE
L'Independent Women's Forum
Les documents ci-après, fournis par l'Independent Women's Forum (IWF), reflètent le courant conservateur de pensée au sein du mouvement féministe. Ils explorent les divergences entre les vues libérales et conservatrices. L'article se termine par une interview que Mme Anita Blair, vice-présidente exécutive et conseillère générale du IWF, a accordée le 23 mai 1997 à M. John Quintus.
L'IWF est un groupe apolitique, sans but lucratif, établi à Washington et qui cherche « à faire entendre la voix du bon sens et de la raison » sur les questions relatives à la femme. Il a été crée en 1992 par un groupe de femmes de Washington, qui se déclaraient déçues que l'on donne des femmes l'image d'un vaste groupe d'intérêt monolithique « libéral » (progressiste). Elles voulaient faire entendre un autre son de cloche afin de montrer que les femmes ne pensent pas toutes de la même façon et qu'elles ne s'intéressent pas uniquement aux problèmes de leur sexe.
L'IWF ne prend pas position pour ou contre l'avortement, mais se concentre sur les autres questions qui intéressent les femmes. Cet organisme publie une revue trimestrielle, The Women's Quarterly, et un bulletin périodique, Ex Femina. Il intervient également dans des procès qui font date. C'est ainsi qu'il a déposé une requête dans le procès concernant l'Institut militaire de Virginie (VMI, école militaire précédemment réservée aux hommes et à laquelle la Cour suprême a ordonné d'admettre des femmes) et dans une affaire concernant l'université Brown et portant sur la répartition des ressources financières de cet établissement entre les programmes sportifs masculins et féminins en vertu de l'article IX de la Loi sur les droits civiques. L'IWF soutenait d'une part que les collèges universitaires non mixtes comme VMI devaient être autorisés (l'American Civil Liberties Union partage cet avis) et d'autre part que l'on allait à l'encontre du but recherché en exigeant une représentation proportionnelle des deux sexes dans les équipes sportives universitaires sans tenir compte de l'intérêt et de la demande. Dans toutes ses interventions judiciaires, l'IWF tente de définir la position qu'il juge « la meilleure pour l'ensemble de la société et pas seulement pour les femmes ».
Tout comme le President's Interagency Council on Women, l'Independent Women's Forum a une page d'accueil sur la Toile de l'Internet et souhaite recevoir vos commentaires et vos requêtes à l'adresse suivante :
Independent Women's Forum
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Quelques extraits du numéro de décembre 1996 d' Ex Femina illustrent la position de l'IWF sur des questions qui intéressent toute une gamme d'organisations spécialisées dans les problèmes de la femme.
Tenez-vous-en aux faits, chère madame
The Independent Women's Forum (IWF) a demandé à Diana Furchgott-Roth, économiste à l'American Enterprise Institute, et à Christine Stolba, spécialiste d'histoire féminine à l'université Emory, de lui fournir une source commode, facile à consulter et fiable de données sur la condition économique des femmes (aux États-Unis). Leurs travaux ont abouti à un document intitulé Statistiques concernant les femmes : Le progrès économique des femmes aux États-Unis.
Les auteurs de cette étude ont réuni un important volume de données provenant de sources qui font autorité comme le Bureau fédéral du recensement et le ministère américain du travail. Lorsqu'elles ont analysé la croyance populaire en l'existence d'une discrimination contre les femmes au niveau de l'emploi, elles ont fait quelques découvertes surprenantes. Un grand nombre de « faits » bien connus sur la condition de la femme dans l'économie américaine se sont avérés totalement inexacts.
Prenons par exemple la question de la « disparité des salaires ». On nous dit depuis des années que les salaires des femmes ne représentent que de cinquante-neuf à soixante-douze pour cent de ceux des hommes. En fait, cette prétendue disparité disparaît pratiquement si l'on compare des éléments comparables. Ainsi, chez les Américains âgés de vingt-sept à trente-trois ans et sans enfants, les revenus des femmes atteignent quatre-vingt-dix-huit pour cent de ceux des hommes.
Les auteurs ont également examiné ce qu'on appelle le « plafond de verre », c'est-à-dire l'obstacle invisible à l'avancement des femmes dans le monde des affaires, et découvert que les faits sur lesquels s'appuie cette théorie sont eux-mêmes invisibles. Leur étude montre en effet que ce mythe, qui a notamment pour origine le rapport de la Commission fédérale sur les obstacles à la promotion des femmes, ne tient pas compte du fait que les femmes n'ont pas toutes les compétences nécessaires pour accéder à la direction d'une entreprise.
Tout homme qui brigue un poste de cadre supérieur dans une société doit généralement être titulaire d'une maîtrise de gestion des affaires et avoir à son actif de vingt à vingt-cinq ans d'expérience. Or les études antérieures sur les obstacles à la promotion des femmes ne tenaient pas compte des qualifications des intéressés et considéraient l'avancement dans le monde des affaires comme une simple question de chance.
En réalité, au cours des dix dernières années, le nombre de femmes ayant accédé à la vice-présidence d'une société a plus que doublé et il a augmenté de soixante-quinze pour cent pour les postes de premier vice-président. Ces tendances montrent que, lorsqu'elles ont l'expérience professionnelle requise, les femmes prennent leur place à la tête de sociétés et dans les conseils d'administration.
En plus de réfuter ces mythes, Statistiques concernant les femmes cite des faits encourageants sur des progrès féminins dont on entend rarement parler. Saviez-vous, par exemple, que huit millions d'Américaines sont déjà présidentes-directrices générales de leur propre société ? Que les entreprises appartenant à des femmes emploient un travailleur américain sur quatre et que leur chiffre d'affaires annuel totalise 1,4 milliard de dollars ? Saviez-vous qu'à l'heure actuelle, cinquante-cinq pour cent des licences et maîtrises et quarante pour cent de tous les diplômes professionnels sont décernés à des femmes ?
L'attention dont Statistiques concernant les femmes fait l'objet est assurément la bienvenue. Il est grand temps, à notre avis, qu'un nouveau débat national s'engage sur la façon dont les femmes peuvent aider les États-Unis à prospérer, tout en encourageant les femmes et les familles à poursuivre leurs rêves.
Dans son numéro de décembre 1996, Ex Femina a résumé comme suit les résultats d'un sondage effectué auprès de mille deux cents Américains adultes :
Notre propre sondage : les choix des femmes en matière d'emploi
Comment expliquer les différences qui existent entre la condition des femmes et celle des hommes dans l'économie et sur le plan professionnel ? Les femmes remportent plus de diplômes universitaires et notamment plus de diplômes d'études supérieures que les hommes et elles se sont révélées capables de faire le même travail qu'eux. Or il s'avère que le facteur qui limite le salaire et l'avancement des femmes ne semble pas être la domination des hommes, mais celle des enfants !
Les membres de l'Independent Women's Forum voulaient en savoir plus sur les préférences des hommes et des femmes quand on leur donne le choix soit de travailler soit d'élever une famille, ou encore de faire les deux à la fois. Nous avons tout d'abord découvert qu'aux yeux de la plupart des Américains, les possibilités d'éducation sont les mêmes pour les femmes que pour les hommes (soixante-deux pour cent pensaient de cette façon tandis que vingt-six pour cent seulement estimaient qu'il existait un préjugé contre les femmes dans ce domaine). En outre, la plupart des personnes interrogées (soixante-quatre pour cent contre trente pour cent) préféraient créer leur propre affaire que de travailler pour une société, et étaient dans leur grande majorité favorables à une politique de l'emploi non discriminatoire et n'accordant aucun traitement préférentiel à des individus ou à des groupes pour des considérations de race, de sexe, de couleur, ou d'origine ethnique ou nationale.
Les Américains, hommes et femmes, sont pour la souplesse et l'indépendance. Beaucoup d'entre eux aimeraient fonder leur propre affaire, même si cela entraînait pour eux des risques particuliers. Un grand nombre d'entre eux veulent avoir la possibilité de travailler soit à temps partiel soit à temps complet, soit à leur domicile soit dans un bureau, pour tenir compte des exigences de leur emploi et de leur famille. La majorité, notamment les jeunes, et plus particulièrement les jeunes femmes (quatre-vingt-un pour cent) sont prêts à sacrifier leur ancienneté ou une partie de leur salaire en échange de temps libre supplémentaire.
Les Américains se considèrent avant tout comme des individus et non pas comme des membres de groupes d'intérêt. Et compte tenu des progrès de la femme dans l'éducation, une importante majorité d'entre eux ne pensent pas que les femmes soient désavantagées à l'école (...) Les Américains ont un sens profond de l'équité : ils insistent pour que des possibilités soient à offertes à tous, mais pensent qu'en recourant aux quotas et aux traitements préférentiels afin d'aider certains groupes, on exerce une discrimination contre les autres. (Ex Femina, décembre 1996)
Interview d'Anita Blair
Question - Parlez-nous des adhérents au Forum. Qui sont les membres actifs de votre organisation ?
Mme Blair - Nos membres et abonnés sont des hommes et des femmes de tous les âges et de tous les milieux : membres de professions libérales, femmes au foyer, femmes d'affaires, femmes chauffeurs de camion. Nous avons même, à ma connaissance, un shérif adjoint. Tous sont unis par un attachement au bon sens. Les gens qui s'intéressent à ce que dit l'IWF veulent que notre politique reflète des positions intelligentes basées sur les faits et sur le bon sens. Ce que nous désirons vivement, c'est détruire l'idée que les femmes forment un groupe d'intérêt ne s'intéressant qu'aux questions féminines. À notre avis, le rôle qui incombe aux femmes consiste à améliorer la société, qui comprend aussi des hommes et des enfants.
Question - À quelles questions l'IWF s'intéresse-t-il actuellement ?
Mme Blair - Nous nous intéressons de façon permanente à la condition et au progrès des femmes dans l'économie. Ajoutez à cela le désir de faire en sorte que les femmes puissent choisir la façon dont elles mèneront leur existence, qu'elles puissent avoir accès à l'éducation, mais aussi qu'une femme qui souhaite rester à la maison avec ses enfants ait la possibilité de le faire, qu'elle ne soit pas forcée de travailler à cause des impôts ou du coût élevé de la vie.
Nous voulons aussi que les femmes qui veulent être dans les affaires ou avoir une carrière en aient la possibilité, sans toutefois que ce soit pour elles une nécessité. Nous nous occupons aussi très activement des droits civiques, comme on le fait en Californie dans le cadre de l'Initiative en faveur des droits civiques. Nous nous y intéressons sur le plan général et estimons que les gens devraient être jugés sur la base de leur mérite et de leurs qualités morales et non de la couleur de leur peau ou, dans notre cas, de leur sexe. Et nous nous employons activement à montrer que les traitements et objectifs préférentiels et les quotas constituent une altération des objectifs initiaux des programmes en faveur des minorités désavantagées. Ces programmes devraient avoir pour but d'élargir l'horizon des gens et de leur donner les outils dont ils ont besoin pour réussir.
Question - Que pensez-vous donc de la déclaration du président Clinton selon laquelle le programme en faveur des minorités défavorisées devrait être amélioré et non pas éliminé ?
Mme Blair - « Amendez-le, mais n'y mettez pas fin », a-t-il dit. Malheureusement, le monde est devenu si politisé que, pour moi, un tel slogan signifie simplement que le Président veut poursuivre une politique basée sur l'identification des groupes. Et nous sommes fermement convaincus de la nécessité qui s'impose de nous éloigner de ce genre de programme pour adopter une politique basée sur les idées. Notre économie et notre pays doivent reposer sur le mérite, l'assiduité au travail. Nous devons redonner un sens moral au pays. Et quand on identifie les gens uniquement sur la base de la couleur de leur peau, de leur sexe, on ne considère pas l'importance des idées, ce qui est bon ou meilleur, on fait comme si tout était moralement neutre. Je n'accorde guère de crédibilité au Président quand il déclare « Amendez-le, mais n'y mettez pas fin. » Pour moi, cela veut dire que la politique d'identification des groupes va être à la base des amendements auxquels il songe.
Ce que j'aimerais qu'on fasse pour les défavorisés, c'est revenir aux objectifs originaux de Martin Luther King et des gens qui ont uvré en faveur de la Loi de 1964 sur les droits civiques, c'est-à-dire permettre aux individus de prospérer et de réussir sur la base de leur assiduité au travail, de leur mérite et de leurs qualités morales.
Question - Le Forum a-t-il des rapports particuliers avec le groupe des membres féminins du Congrès et quel rôle jouez-vous en matière de législation, pour influencer les législateurs ?
Mme Blair - Nous n'avons de relations spéciales avec personne au Congrès. Il se trouve que nous connaissons quelques parlementaires, principalement parce qu'ils nous ont contactées et nous ont dit s'intéresser à notre travail. Nous sommes une organisation apolitique. Nos efforts tendent à éduquer le public sur les mesures politiques qui devraient présenter un intérêt pour lui. Notre action s'étend à tout ce qui intéresse les femmes c'est-à-dire, en fait, à tout. Nous ne nous limitons pas aux questions concernant les femmes et tentons de nous faire entendre dans les médias en tant que femmes intelligentes qui font des déclarations sensées. Nous ne sommes pas un groupe de pression, nous essayons d'établir les faits afin que les gens qui prennent des décisions, c'est-à-dire les électeurs, les législateurs ou toute autre personne, puissent le faire judicieusement.
Question - Pouvez-vous me dire quelles seront, selon vous, les questions dominantes concernant les femmes, dans quelques années ?
Mme Blair - Je pense que la question des choix de la femme dans l'existence va devenir de plus en plus importante. Nous allons assister à de grands changements dans notre législation fiscale et dans nos lois sur le travail pour permettre à tous, et pas simplement aux femmes, de vivre et de travailler de façon plus satisfaisante sur le plan individuel. Je pense qu'avec l'ordinateur personnel, Bill Gates a apporté une contribution inimaginable à la civilisation. L'ordinateur personnel nous permet d'avoir notre propre entreprise, il permet aux femmes ayant de jeunes enfants de travailler à domicile si elles le souhaitent, à des couples de créer leur petite entreprise. Les ordinateurs sont importants parce qu'ils donnent aux gens la possibilité de vivre comme ils l'entendent, de choisir soit de travailler pour une grosse société, soit de se mettre à leur compte.
Nous constatons que les femmes aiment pouvoir entrer dans la vie active et en sortir en fonction des besoins de leurs enfants. Je pense que le désir d'être avec ses enfants est profondément ancré chez la femme et je ne pense pas que nous ayons jamais une société dans laquelle une femme se contenterait de déposer son enfant à la garderie, puis de l'envoyer à l'école pendant 18 ans, pour s'émerveiller ensuite de l'adulte remarquable qu'il serait devenu. Je crois que le désir fondamental qu'ont les femmes et les familles d'être ensemble va triompher des idées des partisans d'une forte intervention du gouvernement, de ceux qui font pression pour que de nombreux programmes soient financés par l'État afin qu'on puisse éliminer purement et simplement le besoin qu'ont les mères de famille de s'occuper de leurs enfants.
J'estime que toutes les influences économiques qui reflètent les désirs des gens sur le marché vont dans le sens opposé, et qu'au lieu de cela, les gens veulent simplement avoir plus de latitude. Ils veulent pouvoir être avec leurs jeunes enfants. Ils veulent avoir la possibilité de gérer leur propre affaire au lieu d'être à la merci des restructurations, des compressions de personnel et des grosses sociétés. Et c'est, à notre avis, ce qui se passera.
Question - Va-t-il être de plus en plus facile pour les femmes, grâce à l'ordinateur personnel et à d'autres inventions, de concilier leurs obligations professionnelles et leurs responsabilités familiales, compte tenu de la nouvelle politique des sociétés en faveur des horaires variables et de ce genre de choses ?
Mme Blair - Ce qui empêche les sociétés de faire bénéficier leur personnel des horaires variables, ce sont principalement notre législation fiscale et nos lois sur le travail et non pas la mauvaise volonté ou l'arrogance des patrons. Les gens qui font pression en faveur d'une forte intervention du gouvernement sont des imposteurs. Ce dont nous avons réellement besoin, c'est d'une moins grande intervention du gouvernement pour permettre aux gens de faire leur choix.
Je ne pense pas qu'il existe un seul patron qui désire que ses employés soient malheureux. Mais les patrons sont gênés par la législation du travail et par un régime fiscal extrêmement complexe qui tente de pousser les gens à travailler pour les grosses sociétés, où le fisc peut mieux les avoir à l'il. Le fisc ne veut pas que nous travaillions à domicile parce qu'il lui est alors plus difficile de prélever une partie de notre revenu. Il préfère avoir affaire à un nombre restreint de grosses sociétés plutôt qu'à un grand nombre de petites entreprises. Je pense que les gens vont finir par comprendre que c'est le gouvernement qui nous met des bâtons dans les roues. Il ne fournit pas la solution, il fait partie du problème.
Question - Les problèmes tels que la disparité au plan des salaires et des possibilités de promotion vont-ils s'estomper ?
Mme Blair - Je le pense, car l'expérience nous montre qu'il n'est pas possible de tout avoir à la fois. À la fin des années 1970 et au début des années 1980, le cri de ralliement des féministes était le suivant : « Vous pouvez tout avoir ; vous pouvez être une superwoman. » Nous avons actuellement une génération de jeunes femmes dont les mères ont tenté de le faire. Chose remarquable, si vous allez dans un lycée ou dans une université, vous constaterez que les jeunes filles ont une notion très lucide de ce qu'il leur est possible d'accomplir. Elles comprennent que, si elles veulent devenir capitaines d'industrie, par exemple, cela implique un certain nombre de choix. Etre une femme au foyer en implique d'autres et, si elles veulent combiner les deux, il leur faudra faire une troisième série de choix. Elles veulent avoir ces options, mais elles ont des idées très réalistes sur ce que chacune d'elles implique parce qu'elles ont vu leur mère se donner beaucoup de mal pour tenter de tout faire à la fois.
Question - Le coût élevé de l'éducation, quand les familles de la classe moyenne qui envoient leurs enfants à l'université doivent payer vingt-cinq mille dollars par an ...
Mme Blair - Pour moi, la fréquentation de l'université est surestimée. L'informatique supprime la nécessité de la fréquenter. En fait, nous avons un grand nombre de salles de classe virtuelles ; dans l'Ouest, dans des États comme le Montana, par exemple, on peut suivre chez soi des cours d'université menant à un diplôme.
Question - Les études à distance ?
Mme Blair - Effectivement, et cela va éliminer la nécessité d'études universitaires extrêmement coûteuses. Il y a beaucoup de femmes qui sont forcées de travailler en partie parce que c'est pour elle le seul moyen d'envoyer leurs enfants à l'université. Elles ont besoin de ce revenu supplémentaire. Or ces femmes sont mécontentes. Elles protestent contre le coût prohibitif des études. Et quand un étudiant sort de l'université, tout ce qu'il peut obtenir, c'est un emploi dans la restauration rapide. C'est l'un des courants sous-jacents de la société qui affectent beaucoup de gens et qui suscitent beaucoup de ressentiment.
Je fais partie du conseil d'administration du Virginia Military Institute (VMI). Je suis donc au courant des problèmes posés par l'admission des femmes dans un milieu militaire, mais aussi des contraintes financières des universités. Et beaucoup de ces problèmes sont dus à un excès de réglementation. Un grand nombre d'employés du VMI passent toute leur journée à remplir des formulaires, comme les y obligent divers règlements fédéraux, Si seulement le gouvernement voulait limiter son intervention, je pense que les éducateurs feraient un travail plus efficace.
Question - Y a-t-il quelque chose que vous aimeriez dire encore au sujet du Forum ?
Mme Blair - Nous sommes également très actives en ce qui concerne la présence des femmes dans les forces armées. Et cette question est un bon exemple de l'absence de communication entre l'élite féminine et les femmes « normales ». Nous avons parmi nos officiers un grand nombre de femmes dont les aspirations sont généralement liées à leur carrière militaire. Puis il y a les militaires du rang, qui sont beaucoup plus nombreuses. Elles attendent autre chose de l'armée mais, malheureusement, tout est axé sur les besoins des officiers de carrière. Et nous oublions ces femmes soldats, qui n'ont pas la possibilité de s'exprimer. Le Forum cherche donc à parler en leur nom. Tout comme nous tentons, dans bien des cas, de parler pour la femme qui travaille plutôt que pour celle qui exerce une profession libérale, qui a une bonne d'enfants et tout le reste. Nous voulons parler pour les autres gens qui souhaitent avoir une existence normale.
Question - Y a-t-il toujours place, selon vous, pour les établissements scolaires non mixtes comme le VMI ?
Mme Blair - Absolument. Ce que beaucoup de gens ne comprennent pas au sujet de l'affaire du VMI, qui est allée devant la Cour suprême, c'est qu'on avait sur la valeur de l'enseignement non mixte d'abondants témoignages d'experts dont la Cour n'a pas tenu compte. L'enseignement non mixte n'est pas pour tout le monde, certes, mais l'absence d'élèves du sexe opposé permet à un nombre important de garçons et de filles de se concentrer sur leurs études. Cela permet aussi aux enseignants de remédier aux faiblesses éventuelles des garçons ou des filles. Au VMI, par exemple, si vous assistez à une classe d'anglais, vous pourrez entendre des garçons parler de poésie avec beaucoup d'émotion, ce qu'ils hésiteraient probablement à faire si la moitié des élèves étaient des filles.
J'a fait mes études dans un lycée de filles où nous faisions tout nous-mêmes. Quand nous montions une pièce de théâtre, nous étions responsables aussi bien de la construction du décor que du maquillage des acteurs. Nous apprenions ainsi à être indépendantes. Je suis tout à fait partisane du maintien de l'enseignement non mixte en tant qu'option.
(Les opinions exprimées dans cet article ne reflètent pas nécessairement les idées ou la politique du gouvernement des États-Unis.)
La Société
américaine
Revue électronique de l'USIA,
volume 2, numéro 2, juin 1997