En ma qualité de doyen associé de l'École de ressources naturelles de l'université du Wisconsin à Stevens Point, je suis un des responsables du plus vaste programme de ressources naturelles pour les étudiants de premier cycle du pays. Nos mille sept cent cinquante étudiants spécialisés peuvent faire leur choix parmi une trentaine de cursus différents et quelque deux cents cours sur l'environnement ou sur les questions s'y rapportant. Ces étudiants reçoivent un enseignement intensif sur l'environnement ; ils ne représentent malheureusement qu'une minorité.
Bien que de nombreuses institutions permettent de se spécialiser dans l'environnement, soit comme matière principale, soit comme deuxième spécialité, elles n'exigent même pas une instruction de base sur l'environnement. Par conséquent, la vaste majorité des étudiants ne sont pas inscrits à des programmes axés sur l'environnement, et la plupart ne prennent même pas un seul cours d'études générales sur l'environnement. C'est pour apporter à ces étudiants des connaissances de base sur l'environnement que j'ai écrit cet article.
Appel à l'action
Les universités doivent jouer un plus grand rôle pour former des citoyens possédant des rudiments d'écologie. « Action 21 », le plan d'action adopté par les chefs d'État et de gouvernement au Sommet 1992 des Nations Unies sur la Terre, demande que l'on prenne des mesures décisives afin de renforcer l'instruction écologique que reçoivent les citoyens du monde. Ce plan demande spécifiquement aux universités de jouer un rôle de premier plan pour préparer les citoyens à analyser et à résoudre les questions écologiques.
Dans le même ordre d'idées, aux États-Unis, le recueil de suggestions de lois publié en 1994 par le Conseil des gouvernements locaux à l'intention des États de l'Union comprend des modèles de lois sur l'éducation dans le domaine de l'environnement qu'il recommande aux législatures locales d'adopter. Ce modèle de législation déclare que les universités et les écoles professionnelles doivent « mettre en place des programmes qui encouragent l'enseignement des rudiments de l'écologie et qui donnent aux étudiants la possibilité de mener des mouvements écologiques ». Il conseille, à cet effet, aux universités « d'exiger de tous les diplômés qu'ils aient suivi des cours sur l'environnement, ou bien de mettre au point un programme général intégré qui enseigne les rudiments de l'écologie en intégrant cette matière à toutes sortes de cours ».
Que faut-il enseigner?
On a beaucoup écrit depuis vingt-cinq ans sur l'enseignement des questions écologiques et les stratégies nécessaires. Au début des années quatre-vingt, j'ai travaillé avec Harold Hungerford de l'université Southern Illinois et Ben Peyton de l'université Michigan State à définir un ensemble d'objectifs sur l'enseignement de l'écologie qui ont servi dans le monde entier à la recherche et à la préparation de programmes d'études. À notre avis, l'instruction destinée à améliorer les connaissances sur l'environnement doit aider à sensibiliser les citoyens aux questions d'environnement et surtout à en faire des citoyens compétents et dévoués qui travaillent individuellement et collectivement à instaurer un équilibre dynamique entre la qualité de la vie et la qualité de l'environnement. En d'autres termes, les connaissances sur l'environnement doivent être axées sur le développement d'un comportement responsable envers la nature.
Harold Hungerford et Trudi Volk de l'université South Illinois ont examiné les publications à ce sujet et ont conclu que nous pouvons maximiser les occasions de développer des comportements responsables envers la nature au niveau des universités si nous appliquons les directives suivantes:
Des professeurs d'université venant de tous les horizons ont réfléchi à ce qu'il faudrait enseigner pour former des diplomés possédant les rudiments de l'écologie. Un rapport de 1990 intitulé « Comment donner aux étudiants du premier cycle des rudiments d'écologie », qui émane du Forum de recyclage des professeurs de l'enseignement supérieur de Pennsylvanie, recommande de fixer les objectifs suivants pour les étudiants de premier cycle :
Approches utilisées
Les universités suivent toutes sortes de méthodes pour renforcer l'instruction qu'elles dispensent en matière d'écologie.
L'université Tufts a fondé en 1990 un Institut des connaissances écologiques (TELI). Cet institut montre aux professeurs comment intégrer à leurs cours les concepts et questions d'environnement et ils participent à cet effet à des ateliers d'été qui les aident à trouver des idées pour introduire les rudiments de l'écologie dans leurs cours. On peut citer à titre d'exemple un cours d'anglais où des romans tels que Les raisins de la colère servent à discuter des liens entre l'environnement et la culture; un professeur d'art dramatique qui fait participer ses étudiants à des jeux de rôle sur des thèmes écologiques; et un cours d'ingénierie mécanique dans lequel les étudiants essaient de rendre une machine moins gourmande en énergie de façon à ce qu'elle consomme moins de ressources. Le sixième atelier annuel de formation de professeurs a eu lieu du 31 mai au 9 juin 1995.
En juin 1992, l'université Harvard a imité Tufts en créant la chaire Heinz pour encourager les professeurs de Harvard qui ne sont pas des spécialistes de l'environnement à intégrer des éléments d'écologie à leur cours. Des postes similaires ont été créés dans plusieurs autres universités.
Bien que les méthodes instaurées par Tufts et Harvard permettent à des non-spécialistes de prendre des cours à orientation écologique, la majorité des étudiants ne s'y intéressent pas. La seule manière de s'assurer que tous les diplômés possèdent les rudiments de l'écologie est de rendre obligatoires certains cours sur l'écologie dans le programme d'enseignement général.
L'importance d'aborder la question de l'apprentissage des rudiments de l'écologie dans le programme général d'enseignement a été décrite en ces termes par le président de l'université du Montana, Georges Danneson: « Toutes les institutions doivent essayer d'introduire un contenu écologique dans les programmes d'études, y compris dans les programmes d'enseignement général. La vaste majorité des étudiants ne suivront pas un cursus sur l'environnement et ne deviendront pas des spécialistes, mais ils apprendront à comprendre les questions et problèmes écologiques à partir de leur cours d'enseignement général ou des cours en option. Si nous avons l'intention de leur apprendre les rudiments de l'écologie nous devons le faire par la diffusion dans les programmes et par l'enseignement général ».
Modèle de l'université du Wisconsin
À l'université du Wisconsin, le programme d'enseignement général sert à améliorer les connaissances des étudiants en matière d'écologie. En 1990, le chancelier Keith Sanders a nommé un groupe de travail largement représentatif chargé d'examiner les programmes et de déterminer si les matières obligatoires de l'enseignement général préparaient suffisamment les étudiants à confronter les besoins et les attentes de la société. Le groupe de travail a procédé à une analyse documentaire pour déterminer les tendances en ce qui concerne les matières obligatoires dans les programmes universitaires d'enseignement général. Il a également examiné les matières obligatoires dans des dizaines d'autres universités et organisé une série de réunions pour demander leur avis aux professeurs.
À la suite de près de deux années de travail, le groupe d'études a recensé quatorze types de compétences dans un document appelé « Compétences et connaissances que devront avoir les étudiants de UW-SP à partir des années quatre-vingt-dix ». Les rudiments de l'écologie y étaient identifiés comme l'une des compétences que devaient posséder tous les diplômés de cette université.
Ensuite, on a demandé au comité chargé d'établir les critères d'obtention du diplôme d'enseignement général de déterminer si le cursus obligatoire actuel incluait chacune de ces quatorze compétences et connaissances. Ils ont reconnu que ce n'était pas le cas pour les rudiments d'écologie. Le comité a donc élaboré de nouvelles règles comprenant des rudiments d'écologie pour tous les étudiants. Ces règles ont été approuvées par le Sénat des professeurs et par le Chancelier Sanders. Cela signifie que de même que la pensée critique, l'expression écrite, l'expression orale, l'instruction civique et l'instruction scientifique, les rudiments d'écologie font partie intégrante de l'enseignement de base, fourni aux étudiants de l'UW-SP pour les aider à fonctionner au XXIe siècle.
Pour obtenir leur diplôme, les étudiants d'UW-SP doivent suivre un cours de rudiments d'écologie qui leur donne droit à trois unités de valeur. Ces cours doivent répondre aux critères suivants: tout département peut offrir un cours sur l'écologie, aucun cours préalable n'est nécessaire pour suivre ces cours, les thèmes doivent être traités dans une optique interdisciplinaire, l'enseignement en équipe et transdisciplinaire est encouragé, et les propositions de cours sur l'écologie doivent indiquer clairement comment le cours est structuré pour atteindre ses objectifs.
Les objectifs recommandés dans le rapport de Pennsylvanie, « Comment donner aux étudiants du premier cycle des rudiments d'écologie », ont servi de point de départ à l'élaboration des objectifs d'enseignement des rudiments de l'écologie à l'UW-SP. Pour qu'un cours soit habilité à donner des unités de valeur en écologie, il faut qu'il apprenne aux étudiants à :
La plupart des cours de ce type sont ouverts à tous les étudiants, quelle que soit leur spécialité. Certains d'entre eux, tels que « l'Introduction aux études écologiques et à l'éducation sur l'environnement », s'adressent à des groupes particuliers - en l'occurrence les futurs enseignants qui apprennent non seulement le contenu mais aussi les méthodes didactiques.
L'obligation de suivre des cours de rudiments d'écologie à UW-SP rendra-t-elle les diplômés plus conscients de l'environnement ? Je suis certain que oui. Les futurs diplômés devraient avoir davantage de connaissances sur l'environnement et surtout savoir comment travailler individuellement et collectivement pour atteindre un équilibre dynamique entre la qualité de la vie et la qualité de l'environnement, et avoir envie de le faire. Pour y parvenir, il faudra aider les professeurs à comprendre et à appliquer les stratégies recommandées par Hungerford et Volk pour maximiser les comportements non nuisibles à l'environnement. L'application de ces stratégies s'ajoutant à l'instruction axée sur les objectifs d'enseignement des rudiments de l'écologie devrait aboutir à des diplômés qui comprennent l'environnement et s'en sentent responsables.
Il est à souhaiter qu'un nombre croissant d'universités suivront les exemples décrits ici et prendront des mesures pour intégrer les cours d'écologie au programme d'enseignement général. Il n'existe pas d'enseignement plus fondamental que celui qui se concentre sur la perpétuation de la qualité de l'environnement et de la qualité de la vie.
Catalogue de cours sur les rudiments de l'écologie