las m・ias et la d・ntologie - dossiers mondiaux



La port・ du quatri・e pouvoir


Nicholas Johnson


Professeur associ?de droit ?la facult?de droit de l'universit?de l'Iowa,
auteur de How to Talk Back to our Television Set

La Constitution des ・ats-Unis, l'・onomie de march?et une pr・ention contre la r・lementation d・inissent la libert?de la presse aux ・ats-Unis.

« Le Congr・ ne fera aucune loi (...) qui restreigne la libert?de la parole ou de la presse. »

Premier amendement ?la Constitution des ・ats-Unis, 1791



Ces paroles incorporent la libert?de la presse dans la Constitution des ・ats-Unis, le document qui d・init la structure du gouvernement et sert de base au droit am・icain.

En ・ablissant le cadre du gouvernement am・icain, la Constitution assure un ・uilibre entre le pouvoir l・islatif, le pouvoir judiciaire et le pouvoir ex・utif (le pr・ident et le gouvernement), dotant chacun d'eux de pouvoirs s・ar・ et distincts qui ・ablissent un syst・e de poids et contrepoids. Les P・es fondateurs de la nation am・icaine ont con・ avec soin cette structure gouvernementale pour cr・r un syst・e dans lequel la r・artition des attributions entre les divers pouvoirs contribuerait ?sa stabilit?

Au tout d・ut, de la r・ublique lorsque fut con・ ce syst・e de poids et contrepoids, une presse audacieuse ・ait d・?en place, une presse hardie et disparate qui d・on・it avec force l'autorit?du roi d'Angleterre et entra・a les colonies am・icaines dans leur r・olution contre l'empire britannique. Sa libert?・ant prot・・ par la D・laration des droits de 1791, la presse exer・ une forte influence durant les premi・es d・ennies qui suivirent l'ind・endance. La presse am・icaine est fr・uemment qualifi・ de quatri・e pouvoir, ce qui sous-entend qu'elle a la m・e importance que les trois autres pouvoirs cr蜑s par la Constitution.

La l・islation

La pr・ention contre la r・lementation de la presse dans la l・islation am・icaine peut ・re d・rite en quelques paragraphes mais des volumes entiers ont ・? consacr・ ?la lutte parfois f・oce et am・e qui a ・?men・ pour prot・er la libert?de la presse et limiter les exc・ d'un journalisme irresponsable. Tout au long de cette lutte, un pouvoir judiciaire ind・endant a jou?un r・e indispensable dans la protection de la libert? de la presse.

Plusieurs proc・ d・isifs ont pos?des jalons pour ・ablir le droit qu'a la presse de rechercher les informations et de publier des documents officiels ou des faits d・obligeants sur des personnes en vue. C'est ainsi que la Cour supr・e des ・ats-Unis a pris le parti de la presse et non du gouvernement en autorisant la publication de ce qu'on a appel?les « documents du Pentagone », autorisant les journaux am・icains ?publier ces documents confidentiels sur la guerre du Vi・ Nam qu'ils avaient obtenus officieusement, et cela en d・it des objections du gouvernement.

La Cour supr・e a ・alement statu?que la presse devait b・・icier de la protection du premier amendement ?la Constitution contre les lois sur la diffamation, de crainte que des proc・ et dommages-int・・s ・entuels ne d・ouragent les propri・aires de journaux de faire des reportages complets sur les affaires publiques. Pour remporter un proc・ en diffamation contre un journaliste, une personne en vue doit prouver une intention r・lle de nuire que les tribunaux ont d・inie comme la conscience du fait que la d・laration publi・ ・ait fausse ou que l'auteur avait fait preuve « d'une indiff・ence totale ?l'・ard de la fausset?・entuelle de la d・laration en question ».

L'ind・endance r・lle des juges f・・aux am・icains a jou?un r・e primordial dans l'・olution des protections juridiques dont jouit la presse. Les juges f・・aux sont nomm・ par le pr・ident et leur nomination est ratifi・ par le S・at. Ils exercent leurs fonctions ?vie et sont d・ib・・ent tenus ?l'abri des pressions ext・ieures des partis politiques ou des membres de l'ex・utif ou du judiciaire. Leur traitement ne peut ・re r・uit et leur destitution est pratiquement impossible.

En dehors de ces principes bas・ sur la Constitution, rares sont les lois qui r・issent la pratique du journalisme. Le gouvernement am・icain ne d・ivre pas de licences aux journalistes, pas plus qu'il ne contr・e l'approvisionnement de la presse en papier journal ou en encre d'imprimerie. Les journalistes sont toutefois assujettis aux lois applicables ?tous les citoyens. Comme toutes les entreprises et les particuliers, les journaux, les stations de radiodiffusion et les journalistes sont soumis ?l'imp・ sur le revenu et aux taxes ?l'achat. Ils doivent respecter les lois relatives ?l'atteinte ?la propri・?et ?la s・urit?routi・e comme tous leurs concitoyens, quel que soit le z・e avec lequel ils tentent de traquer une nouvelle.

Le march?/B>

L'・onomie joue un r・e primordial dans la pr・entation de l'information au public am・icain dans les journaux, ?la radio, ?la t・・ision et maintenant sur internet. Les m・ias sont des entreprises ?but lucratif. Si les organisations sans but lucratif et celles qui d・endent une cause se font largement entendre dans la presse am・icaine, les principales sources d'information du public - les grands journaux urbains, les hebdomadaires et les r・eaux de t・・ision - ont, quant ?elles, pour objectif de r・liser des b・・ices.

Les protections du premier amendement s'appliquent directement non pas aux journalistes qui recueillent les nouvelles mais aux propri・aires des m・ias qui diffusent les informations. Ces derniers peuvent d・ider de donner une libert?consid・able ?leurs journalistes et reporters. Ils peuvent juger cela souhaitable ?la fois dans leur int・・ financier et dans celui du journalisme. Mais c'est une question de choix et non de l・islation. Les journalistes n'ont pas davantage le droit de voir leurs articles publi・ que les lecteurs celui de faire para・re leurs lettres ?la r・action, pas plus qu'ils n'ont le droit d'acheter de l'espace dans les colonnes d'un journal pour faire valoir un point de vue que le propri・aire du journal a d・id?de censurer.

La Cour supr・e a d・r・?que la libert?de la parole conf・・ par le premier amendement comprenait le droit pour un propri・aire de journal de censurer la parole de tous les autres dans sa publication, et cela m・e s'il s'agit du seul journal, ou de la seule station de radio ou de t・・ision de la localit? En cons・uence, les seules personnes qui ont un droit illimit?de r・andre leurs vues dans la presse en vertu du premier amendement sont les quelques personnes qui poss・ent un organe de presse.

Toutefois, les m・ias sont emp・h・ de diffuser des articles refl・ant exclusivement leurs pr・uges et leur philosophie par les consommateurs am・icains qui sont capables de juger de l'impartialit?et de l'exactitude des reportages disponibles sur le march?de l'information. Les gens clairvoyants ont t・ fait de d・oncer les pr・ug・ et les erreurs qui apparaissent dans les journaux ou bulletins d'information. C'est pourquoi les propri・aires de m・ias qui tentent de fausser leurs reportages pour refl・er leurs propres pr・ug・ risquent de perdre leur auditoire et si celui-ci dispara・, il en va de m・e des recettes procur・s par les annonces publicitaires qui cherchaient ?atteindre ce public.

Les journaux et certains r・eaux de t・・ision avaient l'habitude de s'enorgueillir du mur qu'ils dressaient entre leurs services de publicit?et leurs salles de r・action. Certains affirment que ce mur est en train de s'effondrer. Cela vient en partie de la diminution du nombre des soci・・ de presse r・ultant de la fusion d'un nombre croissant de m・ias divers. Les d・racteurs de ces fusions craignent que les pertes financi・es encourues par les responsables des nouvelles ne soient plus per・es comme la compensation du prestige qu'elles procurent ?la station. Aujourd'hui, les conseils d'administration peuvent consid・er les nouvelles comme une simple source suppl・entaire de profit qui contribue au chiffre d'affaires de la soci・?et ?la valeur de ses actions.

R・liser un ・uilibre entre le journalisme de qualit?et les r・ultats financiers est actuellement l'un des grands probl・es du journalisme am・icain. Lorsque des entreprises menacent d'intenter un proc・ ?un journal pour les critiques contenues dans ses reportages ou de cesser de lui confier leurs annonces, le directeur ou le chef de la r・action d'un journal doit d・ider s'il va publier un article provocant, m・e au risque de faire perdre des revenus ?son journal ou de perdre son emploi. C'est pourquoi l'autocensure qui r・ulte de ce genre de dilemme est peut ・re la forme la plus courante de censure qui influence actuellement le contenu de la presse am・icaine.

Radiodiffusion et t・・ision

Les libert・ garanties par le premier amendement s'appliquent non seulement ? la presse ・rite mais ?la radio et ?la t・・ision. Toutefois, pour avoir le droit d'utiliser les ondes publiques, les propri・aires de stations de radio et de t・・ision sont assujettis ?une r・lementation officielle qui n'est pas impos・ ?leurs coll・ues de la presse ・rite. La Loi de 1927 sur la radio, premi・e loi r・issant la radiodiffusion, refl・e les limites mat・ielles des bandes de fr・uence. Il n'est pas permis ?tout le monde de diffuser sur les ondes car les signaux se brouilleraient mutuellement et les auditeurs ne pourraient capter aucune ・ission.

Lorsque la politique nationale fut instaur・ dans ce domaine, dans les ann・s 1920 et 1930, les ・ats-Unis, contrairement ?la plupart des autres pays, ne choisirent pas de confier les stations ?une agence gouvernementale ou ?une soci・?financ・ et g・・ par le gouvernement, mais opt・ent pour un r・ime hybride. L'・uipement des stations serait entre les mains de propri・aires priv・ mais le droit de diffusion serait r・lement? par le gouvernement et limit?par une licence.

La Commission f・・ale des t・・ommunications (Federal Communication Commission, ou FCC) ・ablie en 1934 est l'organisme de r・lementation responsable de la d・ivrance des licences de diffusion et charg?de veiller ?ce que les titulaires de licences servent « les commodit・, les int・・s et les besoins du public ». ?l'origine, pour pouvoir obtenir cette licence, le propri・aire de station devait limiter la quantit?de publicit?qu'il diffusait et offrir ?ses auditeurs un programme vari?- contenant notamment une large dose de nouvelles et des ・issions d'int・・ public. Mais en dehors de cela, il n'y avait pour ainsi dire aucune ing・ence du gouvernement dans le contenu des programmes.

Au cours des trente derni・es ann・s, une tendance ?la d・・lementation des m・ias s'est manifest・. ?l'heure actuelle, la FCC n'impose pratiquement aucune norme r・lle concernant la qualit?ou le contenu des programmes. Elle a supprim?une r・lementation ant・ieure qui limitait le nombre de stations qu'un propri・aire pouvait poss・er dans une ville donn・ et les soci・・ de radiodiffusion, qui ont remplac?la plupart des propri・aires individuels en tant que titulaires de licences, peuvent maintenant exploiter des centaines de stations de radio et de t・・ision.

Les critiques estiment que la r・uction du nombre de titulaires de licences entra・e une moins grande diversit?des programmes. Quand des soci・・ ach・ent des cha・es de stations de radio, par exemple, elles ont tendance ?homog・・ser leurs programmes et ?moins cibler leurs ・issions sur les auditoires locaux.

Comit・ de vigilance

・ant donn?le r・e capital que joue un journalisme ind・endant dans une soci・?d・ocratique et du fait de l'absence de r・ulateur permanent, le public, les groupes d'int・・ et les associations de journalistes d・loient des efforts ind・endants pour surveiller les m・ias et v・ifier la qualit?de leurs programmes. Aucun d'eux n'a ・idemment le pouvoir de faire respecter ses desiderata, mais ils s'av・ent efficaces pour renforcer les principes d'・uit? de v・acit?et d'exactitude des reportages.

De plus, un grand nombre de publications ont jug?utile de cr・r un poste d'ombudsman - un employ?semi-ind・endant auquel les lecteurs peuvent s'adresser pour se plaindre de la publication et de la qualit?de ses reportages. L'ombudsman peut signaler ces plaintes et la fa・n dont le journal y a donn?suite dans ses pages.

Peu d'institutions rev・ent autant d'importance pour une soci・?d・ocratique qu'une presse libre et ind・endante. Une telle libert?exige que le public, les autorit・ et les organisations civiques soutiennent la v・acit? l'・uit?et l'・uilibre des reportages et qu'ils insistent pour que les m・ias respectent les principes sur lesquels repose leur pouvoir.


Ancien directeur de la Commission f・・ale des t・・ommunications (FCC), M. Nicholas Johnson enseigne actuellement le droit en mati・e de t・・ommunications ?la facult?de droit de l'universit?de l'Iowa situ・ ?Iowa City, Iowa. Son site sur internet : http://www.nicholasjohnson.org

ligne bleue

Retour au d・ut | Dossiers mondiaux, avril 2001 - Sommaire | Revues IIP | Accueil IIP